« On reste trop silencieux devant l’inhumanité »
un texte de Jack Ralite
lundi 16 novembre 2015
Étant souffrant, j’ai regardé la télé toute la nuit du 13 novembre pour être avec ceux que Daech, véritable gouvernement d’épouvante, a assassinés.
Je suis profondément proche des familles et des jeunes à qui la vie a été ôtée si ignominieusement. Mais on ne peut pas seulement souffrir et être solidaire.
Comment résister à pareil crime visant à nous ébranler et souhaitant nous entraîner contre nos concitoyens musulmans ? C’est de garder son sang-froid, de refuser d’être trié à partir de la question religieuse, de combattre le racisme, de continuer à vivre et agir contre l’inhumanité et la barbarie de tels actes.
Il faut aussi ne pas oublier l’histoire coloniale, ces forfaits refoulés qui nous reviennent aujourd’hui à la figure à travers deux pratiques inadmissibles : on laisse se noyer encore d’innombrables hommes, des femmes et des enfants dans la mer Méditerranée, qui fuient devant les tueries de Daech.
On reste trop silencieux devant l’inhumanité qui refuse, en Europe, les réfugiés fuyant la mort.
Il y a urgence à prendre un tournant dans ces deux domaines, les noyés, les refusés et les assassinés du 13 novembre étant également des victimes du terrorisme.
Nous devons, gouvernement et citoyens, nous compromettre avec la personne humaine.
Chaque jour, chacune, chacun doit se dire : « Si tu n’agis pas ce jour, alors qui ? » « Si tu n’agis pas maintenant, alors quand ? »
La vie pour se protéger a besoin de l’engagement de tous, autant que de l’engagement de chacun.
À plusieurs moments de notre histoire, quand le chacune-chacun a su se croiser avec le tous, et réciproquement, nous avons été invincibles.
Servons-nous de ces pensées. « L’homme est plein à chaque minute de possibilités non réalisées », disait le psychologue Vygotski.
Enrageons, oui, mais surtout construisons « les yeux ouverts ».
texte publié par l’Humanité du 16 novembre
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