"La culture c’est l’avenir, le redressement, l’instrument de l’émancipation."

Lettre de Jack Ralite au Président de la République

jeudi 20 février 2014

Jack Ralite, ancien ministre, animateur des Etats généraux de la culture, avec Catherine Tasca, sénatrice et ancienne ministre de la Culture et Dominique Blanc, comédienne, a rédigé ce courrier à l’intention de François Hollande sur les questions culturelles.

"Monsieur le Président,

Par nos engagements culturels, artistiques et citoyens, nous sommes fidèlement attachés à la politique culturelle française que nous entendons voir se développer selon le principe d’invention de la perpétuelle ouverture. Or, nous constatons que cette démarche après avoir marqué le pas connaît notamment par la politique budgétaire de notre pays une situation s’aggravant de jour en jour. Beaucoup de ce qui avait été construit patiemment se fissure, voire se casse et risque même de disparaître. Le patrimoine dans sa diversité, le spectacle vivant dans son pluralisme, l’écriture, les arts plastiques, les arts de l’image et l’action culturelle sont en danger.
Faute de crédits suffisants, de personnels, de négociations, de considération et de reconnaissance du travail humain, du respect des métiers, se répandent des malaises, des souffrances, des colères. Le Ministère de la Culture risque de n’être plus le grand intercesseur entre les artistes et les citoyens. Il perd son pouvoir d’éclairer, d’illuminer. Les collectivités territoriales, dont le rôle est devenu immense en culture et en art, voient leurs finances brutalisées et réduites par Bercy. L’Europe continue d’avoir une médiocre politique culturelle alors même qu’elle négocie avec les Etats-Unis un Traité de libre échange, gravissime pour la culture. Google, l’un des accapareurs des nouvelles technologies à civiliser, limite les citoyens à n’être que des consommateurs et s’installe en Irlande pour ne pas avoir à payer d’impôts en France.

Le travail est tellement livré au management et à la performance que les personnels se voient ôter leurs capacités de respiration et de symbolisation. On a l’impression que beaucoup d’hommes et de femmes des métiers artistiques sont traités comme s’ils étaient en trop dans la société.

On nous répond, c’est la crise. La crise ne rend pas la culture moins nécessaire, elle la rend au contraire plus indispensable. La culture n’est pas un luxe, dont en période de disette il faudrait se débarrasser, la culture c’est l’avenir, le redressement, l’instrument de l’émancipation. C’est aussi le meilleur antidote à tous les racismes, antisémitismes, communautarismes et autres pensées régressives sur l’homme.
Mais la politique actuelle est marquée par l’idée de « donner au capital humain un traitement économique ». Il y a une exacerbation d’une allégeance dévorante à l’argent. Elle chiffre obsessionnellement, compte autoritairement, alors que les artistes et écrivains déchiffrent et content. Ne tolérons plus que l’esprit des affaires l’emporte sur les affaires de l’esprit.

On est arrivé à l’os, et cinquante ans de constructions commencent à chanceler. Les êtres eux-mêmes sont frappés, le compagnonnage humain s’engourdit. L’omniprésence d’une logique financière d’Etat installe une dominance sur les artistes. Nous craignons le risque du pire dans la demeure culturelle. Le Medef ne vient-il pas de réclamer le transfert à l’Etat des annexes 8 et 10 de l’Unedic relatives aux intermittents du spectacle.

L’urgence est de stopper l’agression contre « l’irréductible humain », là où la femme, l’homme trouvent le respect d’eux-mêmes et le pouvoir de reprendre force contre tous les raidissements normatifs, les coups de pioche, le mépris, l’arrogance. Il est temps à ce « moment brèche » d’accomplir la fonction du refus à l’étage voulu. Il y a besoin d’une nouvelle conscience alors que croît la tentation de réduire la culture à un échange : j’ai produit, tu achètes. La culture se décline au contraire sur le mode : nous nous rencontrons, nous échangeons autour de la création, nous mettons en mouvement nos sensibilités, nos imaginations, nos intelligences, nos disponibilités. C’est cela qui se trouve en danger et requiert notre mobilisation et notre appel en votre direction.

L’histoire garde un geyser de vie pour quiconque a l’oreille fine et écoute éperdument. Encore faut-il renoncer au renoncement. L’homme est plein à chaque minute de possibilités non réalisées. Nous avons tous un pouvoir d’agir à mettre en marche. C’est avec ces idées en tête et au cœœur que nous souhaitons, Monsieur le Président, vous faire part de notre vive inquiétude et vous demander de maintenir et de développer la politique culturelle. Un budget minoré pour ce travail indispensable serait grave. Même le surplace conduirait à des agios humains et politiques, à un freinage dans la culture.

La politique culturelle ne peut marcher à la dérive des vents budgétaires comme la politique sociale d’ailleurs avec qui elle est en très fin circonvoisinage. « L’inaccompli bourdonne d’essentiel » disait René Char.
Nous vous prions de croire, Monsieur le Président de la République, en notre haute considération."

P.-S.

Anne ABEILLE, Sylvie GIRON, Michèle RUST « Les Carnets Bagouet »
Sophie AGUIRRE secrétaire générale de Sud – Culture – Solidaires
José ALFARROBA directeur du théâtre de Vanves et du Festival Artdanthe
Anne ALVARO comédienne
Ariane ASCARIDE comédienne
Georges BALANDIER professeur honoraire à la Sorbonne (sociologie – anthropologie)
Jean Damien BARBIN comédien
Marie-Christine BARRAULT comédienne
Michel BATAILLON dramaturge, et beaucoup d’autres

12 Messages

  • Bonjour,
    Je viens de lire le programme que vous distribuez en ce moment sur le marché.
    Le chapitre sur la culture est très correct.
    Mais surtout j’ai lu l’exellent mot de soutien de Didier Bezace. J’aurai tellement aimé voir la tête de M. Hafidi lorsqu’il a lu ce mot.
    Il est clair qu’il en prend pour sonh grade et à jsute titre. Année après année cet adjoint n’a pour ainsi dire pas été à la hauteur de la fonction et n’a pas aidé à continuer à mettre en avant la noblesse de la création dans notre ville.
    Vivement le changement.

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  • Tu diras à bezace d’habiter à aubervilliers après il pourra me dire pour qui voter

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  • Il y a une dizaine de jours, le journal l’Humanité dirigé par Patrick Le Hyaric, qui se présente sur la liste PCF, FG, PdG, POI, PCOF, a publié un grand article sur la Corée du Nord en se basant sur les conclusions des rapports internationaux qui recoupent toutes les infos sur le drame que vit le peuple coréen.

    Tout aussitôt le site de la Gauche Communiste de Karman qui se présente sur la liste PCF, FG, PdG, Poi, PCOF, a publié un article virulent contre l’Humnaité de Le Hyaric pour mettre en doute les mensonges de la coalition impérialiste sur le régime communiste nord-coréen.

    Pour les curieux, c’est là :

    http://gauchecommuniste.wordpress.com/

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  • Sur la liste Beaudet-Karman figure des membres du PCOF, le Parti Communiste des Ouvriers de France, un parti stalinien issu de la dissdence albanaise du mouvement maoiste ! Rien que ça. Le PCOF est membre du Front de Gauche.
    Des gens déterminés à instaurer la dictature du prolétariat en usant de la violence insurrectionnelle comme le rapporte leur plate-forme politique accessible sans effort sur internet :

    « Le Parti lutte pour la destruction complète du système d’exploitation de l’homme par l’homme et l’instauration du communisme à l’échelle mondiale… Pour atteindre cet objectif final, il faut renverser la bourgeoisie, détruire l’appareil d’Etat bourgeois, instrument de la dictature de la classe bourgeoise… L’objectif stratégique du parti est d’instaurer la dictature du prolétariat et d’édifier le socialisme… Pour réaliser cet objectif, le prolétariat et les masses opprimées dirigés par le Parti doivent user de la violence insurrectionnelle. »

    Beaudet compte sûrement rétablir l’ordre à Aubervilliers avec ces gugusses.

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    • Citez nous nommément les gugusses en question avec leur pédigrée : j’aimerais savoir si les gens pour qui je vais voter ne sont pas actuellement à Pyongyang en train de régler la trajectoire d’un missile ou à Simféropol en train de garder l’aéroport. Auront-ils le temps entre leurs missions en Ukraine, à Cuba ou en Corée de s’occuper d’Aubervilliers ?

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      • ceux qui envahissent l’Ukraine sont des généraux russes aux ordres d’un système autoritaire fidèle tenant d’une ligne économique ultralibérale : privatisations générales, baisse des salaires, soutien aux affairistes mafieux, adhésion au FMI, etc... tout comme l’Europe libérale l’impose au Portugal, en Espagne, en Grèce... sans les chars pour l’instant !

        Les anticommunistes de base devront bien un jour réaliser que les soviets sont morts et que le régime en place à Moscou est de leur bord !

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  • Le Mensuel "La Terrasse" est un journal gratuit distribué devant les salles de spectacles. Ce mois-ci, sa "une " est exceptionnelle et s’intitule
    CULTURE EN DANGER.
    On y lit :
    "l’appauvrisement de la culture, c’est l’appauvrissement de tous les citoyens"
    "les visions comptables sont insuffisantes pour penser le monde et les relations"
    "la crise justifie-t-elle une telle attaque ? le budget de la culture en France, c’est peu de chose. « Cinquante ans de constructions commencent à chanceler » alerte l’homme politique amateur de culture Jack Ralite dans une lettre adressée au président François Hollande le 19 février dernier"

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    • Justement, qu’en est-il du programme du candidat Pascal Beaudet sur ce sujet ?

      En lisant attentivement les propositions sur la culture dans le journal qui a été distribué, je n’y vois que des objectifs vagues, des orientations générales, des incantations gratuites et des affirmations inutiles.
      Par exemple :
      l’orientation des années 1950 doit être relancée. Cela voudrait dire qu’elle s’est arrêtée ou ralentie. Quand ? Comment ? Dans quelle direction faut-il la relancer ?

      « La culture doit être accessible à tous » : Quand on a dit cela, on n’a rien dit. Concrètement que cela signifie t-il, comment va-ton procéder pour faire bénéficier tout le monde ? Les associations culturelles qui interviennent en périscolaire pourront-elles continuer ?

      « La ville consolidera le rayonnement des équipements culturels »
      Comment consolide t-on un rayonnement culturel ? Quelles actions concrètes ? Celui-ci était-il vraiment en baisse ?

      « Elle soutiendra toutes les actions afin d’obtenir les moyens de fonctionner » : Manquerait plus que ça qu’elle le fasse pas ! Cela c’est facile, ça ne coûte pas un rond et cela permet de reporter sur autrui les problèmes.

      « Elle continuera son effort et son soutien », Quelles orientations précises : Augmentation des subventions ? Qu’en sera-t-il des nouvelles associations culturelles ? Combien la ville mettra t-elle ? S’engage-t-elle à combler l’impasse budgétaire du CRR et du Studio ?

      Les friches culturelles seront soutenues : A quelle hauteur ? Toutes ?

      les conférences populaire seront poursuivies : Encore heureux,mais rassurons le candidat, il n’a jamais été question de les arrêter. Le programme de l’an prochain des conférences Condorcet , qui ont pris la suite du Collège de France qui souhaitait arrêter, est déjà prévu.

      Je crois que la copie est à revoir.

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  • Une deuxième lettre de Jack Ralite au Président François Hollande, publiée sur le site du journal "La Terrasse"

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