
Hommage aux 27 fusillés de Châteaubriant
Soyons dignes d’eux !
lundi 24 octobre 2011
Dimanche 23 octobre, à Châteaubriant (Loire-atlantique), s’est déroulée une très belle cérémonie dans la clairière où furent exécutés les 27 otages le 22 octobre 1941, dont le Docteur Antoine Pesqué, médecin à Aubervilliers, communiste et surnommé "le médecin des malheureux".
Après un défilé sur la route qui mène à la carrière, puis le dépôt des gerbes (dont celle du comité local des jeunes d’Aubervilliers), les 7000 personnes présentes ont écouté les allocutions d’Odette Nilès, Bernard Thibault et Pierre Laurent.
Puis une très belle évocation historique intitulée "Tous les Guy Môquet du monde", mise en scène par Alexis Chevalier et le théâtre Messidor a retracé les grandes luttes auxquelles la jeunesse a participé activement, de la manifestation interdite le 11 novembre 1940 jusqu’aux révolutions arabes de 2011. Nos camarades de la jeunesse communiste d’Aubervilliers (Mylène, Yacob et Lorenz partcicipaient à ce spectacle avec de très nombreux autres jeunes de la région de Châteaubriant et de la région parisienne.)
Une dizaine de militants communistes d’Aubervilliers s’étaient également rendus sur place.
Ci-dessous, l’intervention de Pascal Beaudet lors de la cérémonie à l’hôtel de ville d’Aubervilliers le samedi 22 octobre.
« Nous voici, aujourd’hui rendus au 70e anniversaire, de la fusillade de Châteaubriant.
En 2009 et 2010 Mériem Derkaoui et moi-même avons évoqué, ici même, le contexte qui présida aux arrestations de très nombreux albertivillariens et albertivillariennes dès l’automne 1939 suite à l’interdiction du Parti communiste.
Nous avons dit le zèle que déployèrent les policiers d’Aubervilliers pour satisfaire aux exigences de la troisième République pourrissante puis de Vichy. Nous ne reviendrons pas sur ces faits mais l’étiquette que nous portons aujourd’hui reproduit celle que le commissaire Betchen attachait sur la poitrine des communistes d’Aubervilliers, ces communistes dont nous sommes les héritiers.
La haine anticommuniste gangrenait le pays depuis l’automne 1939 au prétexte de la signature du traité de non-agression germano-soviétique et bien que les communistes aient voté les crédits de guerre. Je ne traiterai pas de cet événement diplomatique et politique qui mérite bien plus que les appréciations sommaires qui sont souvent portées. En tout cas la répression s’est abattue sur les militants communistes et Aubervilliers n’a pas été épargnée.
L’été et l’automne 1941 marquent un grand tournant.
Certes depuis une année des réseaux et mouvements divers ont surgi et développent quelque activité mais l’action résistante est somme toute bien maigre. Pour ce qui le concerne, le Parti communiste s’est réorganisé, a développé une structure armée, l’Organisation spéciale. Il a parallèlement créé le 15 mai 1941 une organisation politique unitaire, le Front national de lutte pour l’indépendance de la France dotée d’une structure militaire dans laquelle sont versés 10% des effectifs du parti : les Francs tireurs et partisans qui se substituent à l’Organisation spéciale. Dans le Nord à l’initiative de militants communistes, parmi lesquels émerge le nom de Michel Brulé, les mineurs ont engagé le bras de fer en déclenchant une grève générale du 26 mai au 9 juin que les groupes armés de l’Organisation spéciale dirigés par Charles Debarge appuient et qui sera durement réprimée.
Au cours de l’été 1941, au terme de longs et difficiles débats, la direction du parti communiste décide du passage à la lutte armée : c’est une décision stratégique considérable.
La confrontation militaire avec les nazis et les vichyssois est tout d’abord le fait de cadres politiques ayant souvent l’expérience des Brigades internationales. Ce n’est que progressivement qu’elle va se développer jusqu’à atteindre un caractère de masse au printemps 1944 et viser à l’insurrection nationale.
Pour l’heure, le 21 août, à Paris, Fabien frappe en abattant l’aspirant Moser sur un quai de la station de métro Barbès-Rochechouart. L’action se situe en riposte aux exécutions de Thiszelman et Gautherot arrêtés le 13 août lors d’une manifestation à la porte Saint-Denis et fusillés le 19. « Titi est vengé » dira Fabien.
Cette action ouvre la voie au développement de la lutte armée. Le 20 octobre à Nantes Gilbert Brustlein et Guisco Spartaco exécutent le lieutenant Holtz. Le lendemain, à Bordeaux, Pierre Rebière abat le conseiller d’administration militaire Reimers.
La riposte nazie/vichyssoise ne tarde guère : le 22 octobre on exécute 27 otages à Châteaubriant, 16 autres au champ de tir du Bèle à Nantes et 5 au fort du Mont-Valérien. A Souges, près de Bordeaux, 50 otages sont fusillés en représailles contre l’exécution de Reimers.
Au soir du 22 octobre Pétain non seulement ne condamne pas les fusillades mais appelle à la délation. Il déclare : « Par l’armistice, nous avons déposé les armes. Nous n’avons plus le droit de les reprendre pour frapper les allemands dans le dos (…). Aidez la justice. Je vous jette ce cri d’une voix brisée : ne faites plus de mal à la France. »
Mais qui donc faisait du mal à la France ? Ceux qui, avec des armes de fortune, attaquaient les nazis et leurs amis, ou bien ceux qui pactisaient avec Hitler ? L’engagement dans la lutte armée fut une décision difficile à prendre, mais une fois prise elle fut irréversible.
Au lendemain des fusillades du 22 octobre, la population de Châteaubriant et de ses alentours déposait des fleurs à l’emplacement des neuf poteaux d’exécution. La réponse du peuple au chantage qu’on lui faisait ne laissait place à aucune interprétation. »
4 Messages