
Robert Taillade
"Eh ! Salut toi !"
mercredi 20 avril 2011
C’est avec ces mots que le père Michel Stoeckel a accueilli Robert dans sa maison, la chapelle du Montfort, remplie de ses amis qui ont tenu à lui dire au revoir. Difficile de ne pas reconnaitre la voix de Robert, quand de l’autre trottoir, il lançait son "Eh ! Salut toi !" pour dire bonjour à un ami, un voisin, plaçant sur le même plan les humbles et les grands. Nous savions son attachement à la paroisse du Montfort ; il en était le père Noêl depuis de nombreuses années, fonction qui lui tenait autant à coeur que son titre de maire du Montfort. Nous ne mesurions pas à quel point sa foi était un engagement aussi fort qui s’est forgé par des gestes simples comme des fleurs offertes à la statue de Marie dans cette petite église dont il était devenu un pilier.
Communion et communisme étaient pour Robert de la même veine. En lisant le très beau poème d’Aragon, "La rose et le réséda", son fils François a élégamment dépeint l’homme qu’était son père. "Celui qui croyait au ciel, celui qui n’y croyait pas", Robert était des deux mondes dont le poète dit qu’ils ne sont qu’un. Merci à Nicole, son épouse, à François qui nous ont aidés à comprendre pourquoi Robert s’est toujours battu pour son idéal, comme il s’est battu pendant douze ans contre la maladie qui a fini par avoir raison de lui.
Pascal Beaudet et Jean-Jacques Karman ont rappelé le militant, le responsable politique et syndical qu’il était. Ses actes trahissaient une loyauté sans faille. Il s’en amusait parfois, comme en 1951, lors d’un voyage en URSS, où après un mois de travail en usine, il s’inquiétait de voir son nom, TAILLADE Robert, inscrit au fronton de l’établissement. "Qu’est ce que j’ai encore fait comme connerie ?" s’est il alors exclamé ! Et c’est vrai que des conneries, il en faisait, s’amusent à rappeler ses amis comme Monique Ralite, Madeleine ou Henri Cathalifaud...
Il avait simplement été désigné ouvrier du mois !
Chargé au début des années 60 de dégotter un étudiant politiquement aguerri pour peser dans un vote lors d’un débat à la Sorbonne, Robert ne trouve pas mieux que d’y envoyer Jean-Jacques Karman, alors en apprentissage de chaudronnerie... Inutile de décrire la situation d’inconfort dans lequel se retrouvait le jeune apprenti face à des étudiants comme Krivine qui ont tous eu des responsabilités importantes par la suite... Mais Robert lui avait dit, comme pour le mettre en confiance : "Tu apprends, donc tu es étudiant !" C’était Robert.
Cette maison, c’était aussi la tienne
Dans la chapelle du Montfort, il était chez lui ; au boulot, aussi. Il était chef d’équipe chauffagiste et responsable syndical CGT, que ce soit chez Kodak ou à la centrale thermique de la Défense. A chaque fois, il avait monté le syndicat et obtenu avec les gars une amélioration de la situation des ouvriers. Élu en 1959 conseiller municipal, en même temps que Jack Ralite, dont il a été adjoint au maire, lui, le fils de brigadiste mort pendant la guerre d’Espagne et qui avait été élevé avec ses frères et sœurs par sa seule mère, s’est toujours tourné vers les autres. Monsieur Pif comme on l’appelait aussi parce qu’en même temps que ses tournées d’Huma, il avait derrière lui des enfants qui s’arrachaient le célèbre journal, était un monsieur sérieux qui ne se prenait pas au sérieux. C’est le souvenir qu’il nous laisse, lui qui a siégé 36 ans, complice d’Adrien Huzard ou Gaston Maletras sur les bancs du conseil municipal à la mairie.
Cette maison commune, c’était aussi la tienne, Robert, toi qui y retournais régulièrement ces dernières années pour y traiter grands et petits problèmes, comme indéboulonnable maire du Montfort. Tes amis, tes camarades, souhaitent te redire à quel point ton souvenir restera gravé dans ces lieux où tu étais aussi chez toi. Nous voulons te le dire Robert, et nous le redirons encore avec force. C’est encore plus notre devoir aujourd’hui.
Tes camarades de la section d’Aubervilliers du parti communiste
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