Eau puante

éditorial de Maurice Ulrich dans l’Humanité du 12 mai 2021

mercredi 12 mai 2021

La révolte des jeunes Palestiniens de Jérusalem est juste. On aimerait d’abord, sans attendre, entendre ces mots-là à l’Élysée, dans les capitales du monde comme à l’ONU. Dans la partie orientale de la ville des trois religions, dont le quartier Cheikh Jarrah, ils manifestent depuis des jours contre l’oppression qui peut conduire en prison le simple porteur d’un drapeau palestinien, contre les expulsions programmées de familles entières, contre les provocations. Aux vociférations des extrémistes juifs – « Mort aux Arabes ! » – qui viennent les défier sans que la police s’en émeuve – c’est un euphémisme –, s’ajoute l’utilisation d’inventions aussi sophistiquées qu’ignominieuses comme les canons à eau puante. Ils servent à disperser les rassemblements de soutien aux familles expulsées. L’enjeu, avec le soutien du pouvoir et du premier ministre israélien, Benyamin ­Netanyahou, c’est la colonisation de Jérusalem-Est, la maîtrise totale de toute la ville, dont le sacre comme capitale de l’État hébreu par Donald Trump a été une étape marquante.

Aux violences des derniers jours, avec plus de cinq cents blessés chez les manifestants à la mosquée Al-Aqsa, le troisième lieu saint de l’islam, semblait avoir succédé hier un calme relatif après le renoncement de l’État à sa marche de la conquête de Jérusalem en 1967. Mais il faut appeler un chat un chat et des roquettes des roquettes. C’est en se prévalant de l’aide aux manifestants que le Hamas a choisi de détourner à son profit leur révolte avec une série de tirs ciblant plusieurs villes du Sud et Jérusalem même. En retour, les raids israéliens, totalement intolérables, frappant 140 cibles, ont fait plus de vingt morts civils, dont neuf enfants. Cet embrasement ne sert en rien la cause de la population arabe.

Les phrases creuses non plus. Les provocations, l’oppression, l’apartheid, les humiliations contre Jérusalem-Est doivent cesser. Des sanctions doivent être prises sans attendre les hypothétiques arrangements de couloir que bricoleraient les États-Unis. Il serait temps de clamer aussi qu’un peuple qui en opprime un autre « n’est pas un peuple libre ».

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