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Réforme des rythmes scolaires : 6 questions, quelles réponses ?
lundi 11 février 2013
La réforme des rythmes scolaires dont la nécessité semblait faire consensus serait-elle en train de faire l’unanimité contre elle ? Certes, parents, professionnels, médecins s’accordent à dire que ça ne va pas. Mais Peillon, bille en tête, se met à tout précipiter sans prendre le soin d’un minimum de concertation avec les différents acteurs.
On ne rase plus gratis mais on fonce tête baissée !
Il est vrai que son prédécesseur Darcos avait savonné la planche avec la suppression du samedi matin qui avait contribué à faire des écoliers français ceux qui ont le moins de jours d’école dans l’année. Difficile de faire mieux pour raser gratis, et on doit à Peillon le mérite de tenter d’inverser la logique. Mais on commence sérieusement à en mesurer les dégâts collatéraux.
Il n’en a pas fallu plus pour que la municipalité d’Aubervilliers plonge tête baissée dans le bourbier en ayant comme seule approche comme en quatorze : "on applique dès la rentrée prochaine".
Cela pose six questions.
1/ Neuf demi journées sans la coupure du mercredi (au lieu de huit) constituent elles un mieux ?
Gagner trois quart d’heures par jour suffit-il à compenser la fatigue causée par l’école le mercredi matin, et ce d’autant plus qu’aucun enfant ne devrait quitter l’école avant 16h30 (activités péri-scolaires de 15h15 à 16h30 minimum)
2/ Quelles acteurs pour structurer le temps périscolaire ?
On pense bien sûr aux structures municipales comme les centres de loisirs maternels ou aubervacances loisirs en primaire pour assurer ce service nouveau. Et si le travail mené en profondeur par aubervacances pour un encadrement de qualité des enfants constitue un atout indéniable, notamment avec des équipements comme les centres Jacques Solomon, Anne Sylvestre ou Tony Lainé construits sous la précédente mandature, on est beaucoup plus circonspect sur la capacité de ces structures à généraliser en moins de six mois à 9000 enfants l’existant.
3/ Quelle formation pour les adultes en charge des enfants ?
Comment assurer en moins de six mois le recrutement et la formation des animateurs chargés de ces missions ? Le maire a évoqué les 50 emplois d’avenir que la municipalité souhaitait recruter, mais force est de constater (pour le regretter souvent) qu’on ne s’improvise pas animateur sauf à vouloir transformer une légitime ambition en temps de garderie .
4/ Quelle rupture entre le temps scolaire et le temps périscolaire ?
C’est sans doute la question essentielle, puisque le respect des rythmes de l’enfant suppose de dissocier clairement ce qui est du domaine scolaire et ce qui est du domaine du jeu, fut-il éducatif. Cela suppose une rupture en terme de démarche d’encadrement, donc d’activité, pourquoi pas de lieux et en tout cas de l’aménagement de ceux-ci. Et là, on sent bien que la question des locaux revêt une place essentielle, totalement éludée dans le projet.
5/ Faut-il toucher au temps de pause du repas ?
La question de l’accès à la restauration scolaire n’est pas nouvelle à Aubervilliers (comme dans de nombreuses villes). Mais elle se pose avec une acuité plus grande du fait de l’augmentation régulière des effectifs scolaires depuis dix ans et de l’augmentation de la demande des familles qui souhaitent que leur enfant mange à la cantine. Une augmentation du temps de la pause méridienne permettrait de mieux satisfaire la demande et d’éviter la discrimination pour l’accès à la cantine qui aujourd’hui est devenue insupportable.
Mais elle pose d’autres questions : comment structurer ce temps de pause pour que les enfants bénéficient d’activités éducatives en rupture avec le temps scolaire pour ne pas que ce temps constitue une source de fatigue et de stress supplémentaire nocif au travail scolaire de l’après-midi ? En tout état de cause, on ne saurait se satisfaire de la solution au coup par coup évoquée par la municipalité : les écoles qui auraient beaucoup de rationnaires seraient punies en allongeant le temps de repas alors que les autres conserveraient le temps de pause actuel.
6/ Qui paye ?
L’État prévoit des financements pour deux ans avec un bonus pour les villes qui adopteraient la réforme dès la prochaine rentrée. Mais quid de l’avenir et quid des investissements et des moyens humains supplémentaires qu’il faut engager pour apporter un réel plus qualitatif ? Comme le soulignent nombre d’élus locaux, le fossé entre communes riches et communes pauvres risque de se creuser encore.
N’y aurait-il pas une certaine (ir)responsabilité à engager à la hussarde une ville comme Aubervilliers dans un processus qui concerne 9000 enfants sans prendre sérieusement la mesure des attentes des parents, des professionnels et des spécialistes sur la question ?
Armand Di Bulle
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