Lycée le Corbusier, vendredi 19 octobre 2012 Soirée en hommage aux algériens victimes de la sanglante répression de la manifestation du 17 octobre 1961
Le public rappelle son exigence de vérité et de justice
lundi 5 novembre 2012
C’est une soirée comme l’aurait aimée Mouloud Aounit. Le débat qu’il a toujours appelé de ses voeux, a eu lieu. Et de la plus belle des façons : parce que c’est le public à Aubervilliers qui l’a suscité en réclamant plus de discernement aux propos de l’historien Olivier La Cour Grandmaison sur le silence qui a longtemps pesé sur le drame du 17 octobre. Des centaines d’algériens du FLN avaient alors été victimes de la répression orchestrée par le préfet de police Maurice Papon, nous nous sommes fait l’écho des débats et commémorations sur ce crime d’Etat régulièrement.
On ne peut accepter l’idée selon laquelle tous les partis politiques ont adopté la même attitude sur la question coloniale précisent certains participants. Placer sur le même plan la SFIO et le parti communiste dont le combat anticolonial a toujours été un axe politique essentiel ne permet pas d’avancer dans le sens de la vérité. A propos du 17 octobre, qui s’inscrit dans ce climat de guerre coloniale, Il faut revoir le film de Yasmina Adi, ici on noie les algériens qui avait été projeté au studio l’an passé, pour constater les blancs que la censure a imposé à la presse, et en premier lieu à l’Humanité. De même, l’idée selon laquelle il y aurait d’un côté des militants sincères et de l’autre un appareil politique corrompu ne résiste ni à l’analyse d’un observateur capable d’un minimum de discernement ni à l’examen du contexte politique de l"époque. Jean-Jacques Karman l’a rappelé, le parti communiste défendait les valeurs anticoloniales sans vouloir compromettre la perspective possible d’un nouveau front populaire. C’est dans ce contexte qu’avaient été votés les pleins pouvoirs au socialiste Guy Mollet sur le principe du slogan "Paix en Algérie". Rappelons aussi les risques d’interdiction du parti communiste étaient encore dans les mémoires et que le combat anticolonial était déjà affaibli par la saisie à trente reprises du journal l’Humanité au début des années soixante.
Dépasser le commémoratif, pour dépasser les visions simplistes
C’est une bonne chose que le parti communiste ait ouvert ses archives pour contribuer à la compréhension de cette période et qu’il ait publié un état des lieux sous la forme d’une brochure. On souhaite que toutes les formations politiques adoptent la même démarche de transparence, insiste Meriem Derkaoui, pour ne pas en rester au stade d’affirmations simplistes qui renvoient les protagonistes dos à dos.
La leçon d’humilité du Conseil local des jeunes
Le conseil local des jeunes a montré ses interrogations à travers ses créations de slam en hommage aux victimes du 17 octobre, ses montages vidéos, son travail de lecture écriture. Cette réflexion traduit une soif de justice que ne peut apporter que la rigueur historique et la reconnaissance de ce crime d’État. On a senti poindre une réelle déception au message de François Hollande dont les huit lignes dénonçant cette "tragédie" ont semblé bien timorées à un public averti qui estime qu’on ne peut ménager les responsables. Malgré tout, cela n’a pas empêché la droite de monter au créneau.
A l’heure où la tentation est forte de placer sur le même plan l’ensemble des victimes, Jean-Jacques Karman rappelait d’ailleurs en contrepoint la participation de harkis à la ratonnade du 17 octobre à Aubervilliers, on a besoin de poursuivre le travail engagé sur cette question inscrite dans le contexte des guerres coloniales.
Il n’y a pas de meilleur hommage à rendre à Mouloud Aounit que de continuer. L’initiative prise par le parti communiste (sur laquelle nous reviendrons sur le site) en invitant le 14 novembre prochain à l’école Robespierre l’historien Alain Ruscio et le journaliste Jean-Pierre Vittori sur la question de la torture au cours des guerres coloniales s’inscrit naturellement dans cette perspective.
Éric Plée
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