Vœu du Conseil Municipal d’Aubervilliers pour la réouverture des lieux culturels et le soutien aux acteurs et actrices culturel.le.s de la ville.

Vœu présenté par le groupe des élu.e.s communistes, écologistes et citoyen.ne.s au conseil municipal du 15 avril 2021

mardi 20 avril 2021

Rien ne va plus !

Depuis le 28 octobre 2020, les lieux de culture sont à l’arrêt. Les salles de cinéma, de théâtre, les lieux de spectacle et de création, les musées... sont figés, vides, privés de leur raison d’être : le public.

En miroir, les citoyen.ne.s de ce pays sont privés de culture : c’est-à-dire qu’ils sont privés des lieux collectifs où partager avec les artistes et les autres spectateurs et spectatrices, les sensations diverses et entremêlées que leur offrent les spectacles, les films, les expositions, les performances...

L’arrêt de la diffusion vivante et sa conséquence, le ralentissement de la création, fait peser un danger ultime sur l’humanité tout entière.
D’abord parce que les voies des catharsis individuelles et collectives sont closes. Depuis toujours, lesreprésentations culturelles permettent de toucher les sensibilités individuelles et collectives indispensables à l’équilibre psychologique des personnes et des groupes. Cet arrêt contribue aux difficultés psychologiques dont nous souffrons tous peu ou prou.

La mécanique de la création est brisée dans une période où plus que jamais nous ressentons le besoin tantôt d’échanger, de confronter nos sentiments, nos doutes, nos craintes et nos espoirs ; tantôt de nous échapper, de nous libérer à travers une image, un son, un geste, un mot.

C’est pourquoi le conseil municipal d’Aubervilliers fait sienne cette phrase de la déclaration des droits de la culture, au sortir de ses États Généraux initié par Jack Ralite :

« Nous proclamons qu’il n’y a pas dans une nation de valeurs culturelles capables de vivifier son passé comme de dessiner son avenir sans les incessantes trouvailles de la création artistique, sans la liberté de leur confrontation, sans la volonté d’en faire le bien commun des artistes et leur peuple »

Ensuite cet arrêt vient s’ajouter aux difficultés économiques quotidiennes des Français qui sont fortement impactés, tout particulièrement dans les villes populaires comme Aubervilliers.

Le monde de la culture est un écosystème fragile. Une chaîne délicate qui peut être brisée par des décisions trop verticales. Les auteurs, les artistes, les créateurs, les techniciens sont précarisés par cette situation. Heureusement, le régime de l’intermittence permet à beaucoup d’entre eux de survivre. Mais pour les autres ? Celles et ceux qui devaient au sortir de leurs études entrer dans ce système ? Celles et ceux qui vivent du spectacle mais qui ne
sont pas intermittents : les prestataires événementiels ? Les contrats à durée déterminée ? Qu’ont-ils ? Rien.

A Aubervilliers, ils et elles sont très nombreux à vivre pour la culture : techniciens, graphistes, acteurs et actrices, chanteurs et chanteuses, photographes, peintres, sculpteurs et sculptrices, techniciens, roads, éclairagistes, preneurs de sons, producteurs, distributeurs... ils et elles ont choisi de s’installer dans notre ville pour s’inscrire dans son histoire culturelle populaire. Une histoire combative et ambitieuse qui a pris le parti grâce à Jack Ralite de ne jamais en rabattre sur une ambition : rendre la culture la plus exigeante populaire et nourrir de manière permanente la relation entre la création et la diffusion culturelle.

Ne rien dire à leur endroit, serait devenir complice de la paupérisation de celles et ceux qui souffrent en silence.

Pire encore la réforme de l’assurance chômage passée en catimini par ordonnance va encore plus précariser des milliers d’habitants en les privant de leurs droits, de leurs indemnités. La majorité présidentielle est coupable de jeter dans la pauvreté des milliers de concitoyens.

A cause de cette réforme, un salarié qui enchaînait les CDD dans le secteur événementiel par exemple verra ses droits arrêtés à partir du 1er juillet prochain. C’est-à-dire qu’il n’aura plus comme source de revenu que le RSA. C’est un véritable scandale.

Depuis plusieurs mois, les hommes et les femmes de la culture sont mobilisés pour obtenir le droit d’exercer leurs métiers et leurs fonctions. Ils dénoncent le fait que l’on puisse se retrouver à plusieurs centaines dans un lieu de culte, mais pas dans une salle de théâtre. Alors qu’il est admis par les scientifiques que le virus se transmet moins dans ces lieux que dans les écoles, aucune discussion sur le protocole sanitaire n’a été engagée par les autorités.

En décembre 2020, suite au référé-liberté déposé par l’ensemble des organisations représentatives des artistes, le conseil d’État a clairement exprimé dans son délibéré que la fermeture de nos établissements ne pouvait s’inscrire dans la durée sans porter une atteinte grave à plusieurs libertés fondamentales dont la liberté de création et d’expression.

Depuis, des dizaines de théâtres sont occupés dont le théâtre de la Commune depuis le 18 mars 2021. Ses occupant.e.s dénoncent cette situation et construisent des revendications en lien avec l’ensemble des structures mobilisées.

Avec eux, conscient de ces enjeux et des conséquences pour les vies de milliers de personnes dont des centaines d’Albertivilarien.ne.s, le conseil municipal se prononce pour :

- La réouverture des lieux culturels dans les plus brefs délais, avec le protocole sanitaire proposé par les organisations professionnelles.

- La prolongation pour une année encore des droits des intermittents du spectacle, compte tenu que les conditions de cette reprise se ferait dans un contexte où
l’immense majorité des artistes et technicien.ne.s n’auront pu exercer aucune activité professionnelle.

- La suppression de la réforme profondément injuste de l’assurance chômage,dans un contexte où les plus fragilisé.e.s de nos concitoyen.ne.s sont déjà les grandes victimes de la crise économique que nous traversons.

- La sanctuarisation des budgets de la culture de notre collectivité, la ville d’Aubervilliers.

- Un plan de relance local des activités culturelles et artistiques, qui doit commencer par la construction d’un nouveau bâtiment pour le théâtre de la Commune et la création d’une seconde salle pour le cinéma Le Studio dans la partie libérée du bâtiment.

Lors du conseil municipal du 15 avril, le groupe d’élu.e.s que je préside a décidé de proposer un voeu en soutien au monde de la culture.
Ce voeu partait des revendications principales des actrices et des acteurs de la culture : la réouverture des lieux artistiques au plus vite, la prolongation des droits des intermittents, la suppression de la réforme inique de l’assurance chômage.
A cela, s’ajoutait des propositions locales pour sanctuariser les budgets municipaux alloués à la culture ainsi qu’un plan de relance des activités culturelles en commençant par la construction d’un nouveau théâtre et l’extension du cinéma.

La Maire a proposé un amendement au voeu, le vidant de sa substance revendicative et supprimant les engagements municipaux qui y étaient inscrits.

Par souci de conciliation, et compte tenu de l’importance du sujet, j’ai proposé un compromis qui consistait à accepter de supprimer les références aux revendications nationales mais en gardant les engagements locaux.
La Maire a refusé cette opportunité de faire voter un voeu à l’unanimité.

En conséquence, c’est bien le voeu originel qui a été soumis au vote.
Sans surprise, l’ensemble des élus de droite s’y sont opposés, en cohérence avec leur soutien au Gouvernement.
Le groupe socialiste et Aubervilliers En Commun se sont abstenus.
Le groupe des élus communistes, de l’Alternative Citoyenne et de la Gauche Communiste ont voté pour le voeu et le soutien au monde de la culture.

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